
Sébastien Ajavon
Sébastien Ajavon n’obtient pas gain de cause dans l’affaire de redevance TVA. Dans une requête introduite devant la Cour africaine, Sébastien Ajavon a demandé à la juridiction d’Arusha de condamner l’État béninois à lui payer trois milliards huit-cent-soixante-neuf millions soixante-onze mille deux cents vingt-quatre (3 869 071 224) de francs CFA au titre des fonds bloqués par l’État du Bénin, assortie des intérêts au taux d’escompte de la Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO).
Il réclame également un milliard cinq cent millions (1 500 000 000) FCFA au titre du préjudice moral. C’est dans le dossier TVA opposant sa société Comon S.A à l’État. Une autre demande de Sébastien Ajavon à la Cour africaine est l’annulation pure et simple de « l’arrêt n°021/CRIET/COM/2020 du 29 mai 2020 de non-lieu partiel et de renvoi devant la Chambre des jugements de la CRIET statuant en matière correctionnelle et tout acte, décision judiciaire ou condamnation qui en serait la conséquence directe ». L’opposant béninois affirme devant la Cour africaine l’impossibilité pour lui d’avoir droit à un procès équitable pour irrecevabilité de l’action civile pour cause de transaction jouissant de l’autorité de la chose jugée, protégé par l’article 7 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.
Les faits mis en cause par Ajavon
Selon la plainte introduite devant la juridiction, Sébastien Ajavon expose que sa société COMON SA, spécialisée dans l’import et l’export de produits alimentaires et que conformément à la réglementation interne, les exporte, en grande partie, vers les pays limitrophes du Bénin, notamment le Nigéria et le Niger, en bénéficiant du remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée(TVA).
En 2011, il affirme que le Bénin a notifié à sa société son refus de lui rembourser les crédits de TVA des 3ème au 6ème bimestre de l’année 2009 et des 1er au 6ème bimestre de l’année 2010, d’un montant total de treize milliards quatre cent quatre-vingt-sept millions deux cent quarante-six mille huit cent quatre-vingt-treize (13 487 246 893) FCFA. Pour justifier sa décision, le Bénin a évoqué la mesure d’interdiction d’exportation vers le Nigeria et le défaut de signature de son ambassadeur accrédité dans ce pays sur le certificat d’entrée des marchandises.
En réaction, Sébastien Ajavon souligne avoir a exercé un recours administratif contre la décision de l’État béninois devant la Chambre administrative de la Cour suprême. « Par jugement en date du 08 février 2013, ledit Tribunal a condamné l’État défendeur à payer à la société COMON SA la somme de treize milliards quatre cent quatre-vingt-sept millions deux cent quarante-six mille huit cent quatre-vingt-treize (13 487 246 893) FCFA, décision contre laquelle les deux parties ont relevé appel », souligne-t-il.
Le Requérant indique qu’il s’en est suivi une réaction en cascade de l’État défendeur, notamment un « redressement fiscal de la TVA et de l’Acompte sur Impôts assis sur le Bénéfice (AIB) pour un montant total de trente-cinq milliards deux cent vingt-cinq mille millions cent trente-trois mille six cent trente (35 225 133 630) FCFA, confirmé par la lettre n°026/MEF/DC/SGM/DGID/DGE/SA-1 du 29 février 2012 ». Par la suite, Sébastien Ajavon que l’État béninois et sa société ont trouvé un règlement à l’amiable.
Il fait savoir que conformément à ses engagements, la société COMON SA s’est désistée de son action devant la Cour suprême qui lui en a donné acte par arrêt du 19 novembre 2015. Il souligne que l’Agent judiciaire du trésor a transmis le protocole d’accord au procureur de la République qui, suivant avis du 24 mars 2015, a classé sans suite la procédure pénale ouverte à l’encontre du Requérant. Il ajoute que, l’État du Bénin avait même entamé le remboursement des crédits de TVA.
En 2017, il apprend que contre toute attente l’État béninois a cessé d’honorer ses engagements pécuniaires résultant du protocole d’accord, à l’égard de la société COMON SA. Il estime que ce refus de paiement de l’État défendeur était la conséquence des rapports politiques conflictuels entre lui et le Président Patrice Talon nés du dossier dit « des 18 kg de cocaïne ». « Le Requérant ajoute que courant novembre 2017, sur la base des faits ayant abouti au jugement d’homologation rendu le 09 février 2015 par le Tribunal de première instance de Cotonou, l’État défendeur a déposé à son encontre une plainte avec constitution de partie civile, pour faux en écriture authentique ou publique par fausse signature, complicité et escroquerie, devant le 1er cabinet d’instruction du Tribunal de première instance de Cotonou », a-t-il signalé
Sébastien Ajavon fait savoir qu’en 2018 la procédure pénale a été transmise à la Commission d’instruction de la CRIET qui a modifié l’inculpation en « faux en écriture publique, complicité de faux en écriture publique et escroquerie». « Sans aucun interrogatoire au fond ni confrontation, et sans que ses conseils aient pris connaissance des pièces, le parquet a pris le 27 mai 2020, un réquisitoire définitif à la suite duquel la Commission d’instruction a rendu le 29 mai 2020, un arrêt de non-lieu partiel et de renvoi devant la chambre des jugements de la CRIET. Cet arrêt a été confirmé par l’arrêt du 18 juin 2021 de la Section de l’instruction de la Chambre des appels de la CRIET contre lequel il a formé un pourvoi en cassation le 18 juin 2020 », fait-il remarquer
Le Bénin demande l’incompétence de la Cour
Face à la requête introduite par Ajavon, l’État béninois argue, au soutien de son exception, d’une part que « le requérant se contente d’évoquer des articles de la Charte sans les rattacher à des faits de violation et d’autre part, que la Cour est appelée à agir comme une juridiction d’appel et juge d’exécution des décisions internes. « Le Bénin fait valoir que conformément à l’article 3 du Protocole, le Requérant doit déférer un différend concernant les instruments de la Cour.
« L’État défendeur affirme que le Requérant sollicite l’annulation de l’arrêt de non-lieu partiel n°021/CRIET/COM/2020 du 29 mai 2020, l’exécution forcée du jugement n°16/13/1ère –CCM du 08 février 2013, du protocole d’accord du 31 décembre 2014 et du jugement d’homologation n°007/AUD-PD du 09 février 2015. Selon l’État défendeur, ces demandes du Requérant échappent à la compétence de la Cour », lit-on dans la décision
Pour le Bénin, la Cour africaine n’est pas juge de l’exécution des décisions et titres exécutoires internes et ne saurait garantir l’exécution d’un accord frauduleux soumis à l’appréciation des juridictions pénales internes. « L’État défendeur fait valoir, en outre, que la demande d’annulation de l’arrêt de non-lieu vise à remettre en cause une décision du juge national alors que la Cour a rappelé dans sa jurisprudence qu’elle n’est pas une instance d’appel des décisions rendues par les juridictions nationales », souligne le Bénin. Dans son mémoire déposé devant la juridiction d’Arusha, l’État béninois souligne que l’opposant Ajavon n’a pas épuisé les voies de recours à l’interne avant de porter l’affaire devant elle.
Requête irrecevable
Dans son verdict, la Cour africaine a déclaré que la requête de l’opposant Sébastien Ajavon est irrecevable. Elle relève que le requérant n’a pas épuisé les voies de recours judiciaires à l’interne. « La Cour relève qu’en l’espèce, le Requérant n’indique aucune entrave de nature procédurale ou d’une autre nature en relation avec le pourvoi en cassation devant la Cour Suprême. D’ailleurs, la Cour note que la Cour suprême a vidé sa saisine par un arrêt rendu le 29 janvier 2021 soit sept (7) mois après la date à laquelle le Requérant s’est pourvu en cassation. Au vu de ce qui précède, la Cour estime que les arguments du Requérant sont inopérants et qu’il a introduit prématurément son recours devant la Cour de céans », signale la décision.
Selon les juges de la Cour africaine, Sébastien Ajavon « aurait dû attendre l’issue de son pourvoi en cassation, à moins que la procédure de ce recours ne fut prolongée de façon anormale, ce qui, en l’espèce, n’est pas le cas puisqu’il n’a saisi la Cour de céans que quatre (4) jours après avoir formé son pourvoi en cassation ». « En conséquence, la Cour déclare fondée l’exception tirée du non épuisement des recours internes et conclut que la Requête ne satisfait pas à l’exigence de la règle 50 du Règlement », précise l’arrêt rendu le 02 décembre 2021.
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