Ganiou Soglo
En 2021, vous avez présenté votre candidature à la présidentielle. Mais pas suivant les normes adoptées suite à des réformes opérées par les autorités. Pourquoi cela ?
J’ai été candidat en m’appuyant sur la constitution de 1990. Car, je ne reconnais pas les lois qui ont été votées et promulguées par ce régime. Nous avons eu la chance en 89, 90 de connaître une conférence nationale qui a été, après, copiée dans d’autres pays en Afrique. Et, au sortir de cette conférence, il y a eu un référendum qui a amené notre peuple à voter pour une nouvelle constitution. Ce n’est pas quelque chose qui a été fait par quelques individus mais c’est toute la nation.
Ce qui s’est passé dans notre pays en 2019, on a fait du tripatouillage. Il y a quelques personnes qui ont fait un tripatouillage à 2, 3 heures du matin en touchant la constitution. Ce n’est pas notre constitution ça. La constitution sur laquelle nous-là, nous avons jusqu’à présent cru, sur laquelle nous pensons que notre pays, les Béninoises et les Béninoises ont émis un souhait, c’est celle de 1990.
Est-ce que vous ne pensez pas que l’idéal aurait été de présenter votre candidature suivant les normes actuelles de sorte à ce que, une fois au pouvoir, vous puissiez les changer ?
Non, Non. Absolument pas. C’est votre point de vue mais pas le mien.
On peut craindre que votre candidature ne soit jamais acceptée…
Vous savez, dans la vie des hommes, on prend date. J’ai le courage de dire que je ne suis pas d’accord pour telle ou telle raison. Et, je prends date. Le peuple prend date vis-à-vis de nos propositions et de ce qu’on a à dire. Le peuple nous entend, nous écoute. Le peuple a besoin que certains de ses leaders soient au Bénin, disent leurs vérités sans crainte. Je vais vous le dire, on a voulu me tuer mais je suis au Bénin, je vis au Bénin. Quand on m’a tiré dessus, on a convenu avec ma mère que je rentre avant le premier tour.
J’aurais pu rester en Europe hein comme l’a fait le chef de l’Etat qui est resté pendant trois ans en France et dire que ma sécurité n’est pas assurée au Bénin. Quoi qu’il m’en coûte je vais rester dans mon pays. Je vivrai au Bénin et je dirai ce que j’ai à dire au Bénin et nulle part ailleurs.
C’est votre droit…
Je vais dire monsieur le journaliste, à un moment donné, il y a des hommes et femmes qui sont morts en France pour qu'hier, notre président ait pu fuir et aller dans ce pays. Il y a eu des millions de morts. Peut-être que les gens ne sont pas au courant. On a décapité une reine et un roi pour que la France soit cette République qu’on applaudit tant aujourd’hui et qui a permis au premier magistrat de notre pays d’aller se réfugier quand il a eu des problèmes avec l’ancien président, (Boni Yayi, Ndlr). Alors, je vais vous dire, moi je suis droit dans mes bottes comme ma mère l’a été. Ce n’est pas de l’étranger, c’est d’ici que je suis opposant.
Nous sommes dans un pays démocratique…
Pour moi, on est dans une dictature, on n’est plus en démocratie. On peut me reprocher de me répéter. Mais je répète ça parce qu’à l’époque, ceux qui ont tambouriné à nous dire : ''la démocratie est en danger, le président Yayi Boni est un…''. Qu’est-ce qu’on n’a pas entendu ? Aujourd’hui, il faudrait ne rien dire ? C’est trop facile ça. Moi, je n’ai pas oublié les mercredis rouges (marches et mouvements de protestation initiés entre 2013 et 2014 pour certaines organisations de la société civile pour faire barrière à un supposé projet de révision constitution par Boni Yayi, alors président de la République, dénoncer sa gouvernance politique/démocratique et les violations des droits humains par son régime, Ndlr). Aujourd’hui, nous menons le même combat pour la liberté, pour la démocratie dans notre pays.
Vous avez dit tout à l’heure que vous preniez date. Est-ce que cela veut dire que vous serez candidat en 2026 ?
Je pense que ce n’est pas le plus important. Le plus important, c’est de libérer notre peuple de la peur qu’elle a légitimement du fait qu’on lui ait tiré dessus. Oui, les gens ont peur. C’est légitime. Il n’y a que le fou qui n’a pas peur. Mais la peur, elle se maîtrise. C’est à nous, les hommes politiques, de montrer l’exemple. Vous savez, j’ai fait une promesse à ma mère : il faut être dans le pardon mais pas dans l’oubli. Rosine Vieyra Soglo a été une dame courageuse qui a dit des choses à l’Assemblée nationale. Je considère que je rentre un tout petit peu dans ses pas.
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