Landry Adélakoun, juriste et consultant en droit humain et démocratie
La fusion entre le PRD et l’UP célébrée en grande pompe en 2022 sous la bannière de l’Union Progressiste le Renouveau (UPR) est-elle entachée d’irrégularités juridiques ? Invité de l’émission Version Originale diffusée dimanche 8 juin 2025 sur TVC, le juriste Landry Adélakoun a livré son analyse des contradictions que soulèverait cette union, au regard de la Charte des partis politiques.
Au cœur de ses explications, une incompatibilité entre les modalités de la fusion et le principe fondamental d’exclusivité de l’adhésion politique.
L’homme de droit rapporte que le PRD dit dans ses statuts que sa fusion avec l'UP n'entraîne pas sa dissolution ou sa disparition. Les dispositions qui sous-tendent cette affirmation ont été rappelées dans une correspondance du président du PRD au ministre de l'intérieur, début juin 2025. Rendue publique sur les réseaux sociaux, la lettre a été authentifiée par Banouto auprès des responsables du PRD.
Sur la base des statuts en questions, estime le juriste, il en résulterait une situation dans laquelle un citoyen pourrait se retrouver, de facto, affilié à deux partis politiques : « Le militant du PRD devient aussi militant du parti politique UP le Renouveau », constate le juriste. Or, précise-t-il, cela constitue une violation manifeste de l’interdiction d’appartenance multiple.
« Vous ne pouvez pas être membre de plus d’un parti politique », rappelle-t-il, en référence à l’article 11 de la Charte des partis politiques.
La responsabilité du ministère de l’Intérieur pointée
Pour Landry Adélakoun, cette confusion est révélatrice d’un défaut de vigilance du ministère de l’Intérieur, chargé de s’assurer de la conformité juridique des déclarations administratives des partis politiques.
Il soutient que cette situation n’aurait pas dû exister si le ministère de l’Intérieur avait correctement exercé ses prérogatives de contrôle. Le consultant en droit humain et démocratie s’appuie pour cela sur l’article 19 de la Charte des partis politiques. « Le ministère de l’Intérieur est chargé de faire toutes les études utiles, toutes les recherches utiles, avant de décider de la conformité de la déclaration administrative de création de parti politique », indique-t-il.
À ses yeux, cela implique une vigilance sur la cohérence des statuts transmis par les partis engagés dans une fusion. « Le ministère doit pouvoir veiller à ce que dans les statuts des partis politiques, il n’y ait pas une disposition qui nous renvoie vers un mélange où nous aurons un citoyen membre de deux partis politiques, puisque cela est interdit à l’article 11 », insiste-t-il.
Or, estime-t-il, ce travail de vérification ne semble pas avoir été accompli. « Les gens ont laissé faire, et on se rend compte que la fusion du PRD n’emporte pas sa disparition. »
Un risque de nullité
Il évoque une série d’irrégularités qui pourraient, à terme, entraîner la nullité pure et simple de la création de l’UPR.
Revenant sur les documents administratifs actuellement en vigueur, Landry Adélakoun indique que bien qu’un protocole de fusion ait bien été signé, accompagné d’un récépissé délivré à l’UPR, cela ne suffit pas à écarter les failles de conformité.
Il souligne qu’une irrégularité substantielle, si elle venait à être établie par une autorité compétente, pourrait engendrer l'annulation du parti UPR.
« Si nous arrivons à la conclusion que la naissance du parti politique UP le Renouveau est viciée (...), cette création sera frappée de nullité », prévient le juriste. En droit, rappelle-t-il, un acte frappé de nullité est réputé n’avoir jamais existé, et par conséquent, il ne peut produire aucun effet juridique.
Cette lecture juridique trouve un écho particulier dans les tensions actuelles entre le PRD et le ministère de l’Intérieur. Dans une lettre en date du 2 juin 2025, consultée par Banouto, Me Adrien Houngbédji a formellement contesté des lignes d’une correspondance ministérielle qui affirmait que le PRD avait cessé d’exister depuis la fusion.
« Écrire que le PRD a cessé d'exister à compter de la date de sa fusion avec l'UP est tout à fait contraire à la réalité », fait savoir le leader politique des "Tchoco-Tchoco". Il a par ailleurs rappelé que le PRD a reçu un récépissé définitif daté du 26 août 2022, soit après la signature du protocole d’accord.
Avant cette lettre du vétéran de la politique au Bénin, le 26 mai 2025, il avait reçu à son domicile Joseph Djogbénou, président de l’UPR, sur fond de dissensions grandissantes. Une rencontre à huis clos à l'issue de laquelle aucune déclaration n'a été faite.
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Basile dadjo
il y a 3 semaines