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Navire échoué à Fidjrossè : les explications des militaires et policiers face au contrebandier devant la CRIET

Navire échoué à Fidjrossè : les explications des militaires et policiers face au contrebandier devant la CRIET

Les membres de l’équipage du navire échoué à Fidjrossè à Cotonou et des fonctionnaires de l’armée et de la police interpellés ont comparu, une nouvelle fois, jeudi 28 novembre 2024, devant le juge correctionnelle de la CRIET. Au cours de cette audience, les quatre Béninois poursuivis dans le dossier ont été écoutés sur les accusations mises à leur charge.

Les membres de l’équipage du navire échoué à Fidjrossè à Cotonou et des fonctionnaires de l’armée et de la police interpellés ont comparu, une nouvelle fois, jeudi 28 novembre 2024, devant le juge correctionnelle de la CRIET. Au cours de cette audience, les quatre Béninois poursuivis dans le dossier ont été écoutés sur les accusations mises à leur charge.

Le dossier du navire échoué à Fidjrossè à Cotonou a connu une évolution devant la CRIET. Après la précédente audience de mise en étape (inculpation et constitution d’avocats), des prévenus ont été écoutés à l’audience du jeudi 28 novembre 2024. Dans ce dossier, 18 personnes dont les 14 membres de l’équipage du bateau, trois (3) officiers de l’armée de la police et un contrebandier des produits pétroliers.

 

Il est reproché aux fonctionnaires de l’État des faits d’ « abus de fonctions ». Les membres de l’équipage sont poursuivis pour  « navigation sans titre et infractions aux règles ». Le contrebandier est accusé de « trafic de produits pétroliers ». Ces mis en cause ont été arrêtés après l’échouage du bateau SPSL à Fidjrossè, dimanche 30 juin 2024.

 

Comment le navire s’est retrouvé sur les côtes de Fidjrossè

 

A l’audience de ce jeudi 28 novembre 2024, les quatre Béninois inculpés se sont expliqués sur les faits qui leur sont reprochés. Un peu après midi, le contrebandier a été convoqué à la barre. Il s‘est présenté comme un vendeur de produits pétroliers, un indicateur des agents de la marine et de la police fluviale. L’homme s’est également identifié comme un "ravitailleur" de bateau c’est-à-dire celui qui approvisionne des bateaux de vivres aux larges du Bénin.

 

En ce qui concerne le navire échoué à Fidjrossè, il dit avoir été contacté par le capitaine pour fournir un approvisionnement de 6 millions de FCFA. Ce qui aurait été fait. Il a déclaré qu’en contrepartie de ce service et d’une dette à lui devoir, le capitaine lui a promis 20 tonnes de gasoil. Il devrait faire le transbordement sur la mer, c’est-à-dire pomper le gasoil dans de petites barques pour les ramener à la terre. Cette opération de transbordement est réglementée au Bénin et nécessite une sécurisation du navire par les marins béninois pour éviter tout piratage du bateau.

 

L’indic dit être dans les démarches d’autorisation quand le bateau a eu une panne. Il s’est également vu confier l’achat des pièces pour la réparation du navire. Avant que l’indicateur devenu intermédiaire de circonstance entre le capitaine du navire et les autorités maritimes du Bénin n'opère, le radar de la préfecture maritime a déjà capté la présence du bateau à 10 nautiques (20 km) des côtes béninoises à Grand-Popo 3 à 4 jours avant l’échouage du navire. L’alerte aurait été donnée aux équipes de la base navale de Cotonou et de la police fluviale.

 

Selon l’accusation, c’est en ce moment que leur collaborateur-indicateur est apparu pour entamer les démarches d’autorisations. Pendant ce temps, une équipe conjointe de la marine et de la police fluviale est allée interpeller l’équipage du bateau et en premier le capitaine pour entamer la procédure de violation de pénétration du navire dans les eaux du Bénin. Le capitaine n’étant pas à bord du navire et avec la panne, son remplaçant n’a pas su maintenir le bateau au mouillage et la marée serait très agitée en ce moment.

 

De présumées négociations

 

A la barre, le contrebandier a indiqué que c’est la première fois qu’il voulait se faire payer par des produits pétroliers. Les autres fois, a-t-il assuré, il a été payé en numéraire. Raison pour laquelle  dit-il être ignorant de la réglementation. A cet effet, explique-t-il, il a pris contact avec le commandant de la base navale de Cotonou, le commandant de la police fluviale et le chef de service information et communication de la préfecture maritime pour l’aider. Tous, affirme-t-il, lui auraient demandé d'aller recruter une agence maritime pour qu' elle se charge de la procédure conformément à la réglementation en vigueur au Bénin.

 

Il se serait lancé dans les présumées négociations pour que ses "collaborateurs" de la marine puissent l’aider. A cet effet, il a déclaré avoir remis une somme de 1,5 million de FCFA au commandant de la base navale de Cotonou. Convoqué devant le juge, le colonel n’a pas reconnu avoir reçu de l’argent des mains du contrebandier. Il a par contre affirmé que l’indicateur l’a appelé. « Au moment où il m’a appelé, j’étais en pleine préparation du défilé motorisé de la marine », a confié le commandant de la base navale de Cotonou qui a fini par répondre à l’appel insistant de l’indicateur. « J’ai décroché et je lui ai dit que je vais le rappeler », a-t-il ajouté. Il a dit l’avoir rappelé quand le contrebandier lui a posé son problème de navire et qu’il lui a conseillé d’aller prendre une agence maritime pour l’aider.

 

Le colonel a expliqué que les services de transbordement sont réglementés. Quand les demandeurs (les navires) sollicitent la marine, elle les assiste pour les opérations de transbordement afin que les pirates ne puissent pas les attaquer. Selon lui, tout bateau qui se trouve à 12 nautiques, soit 24 kilomètres des côtés est considéré dans les eaux du Bénin. Ce navire doit avoir une autorisation pour y séjourner. Trois entités de la marine à savoir la base navale de Cotonou, la base de la police fluviale et la préfecture maritime doivent être informées de sa présence.

 

Un ex-commandant en cache un autre

 

Après le commandant de la base navale de Cotonou, celui de la base fluviale et maritime de Cotonou a été convoqué à la barre. L’officier a reconnu avoir reçu l’appel de l’intermédiaire. Selon le fonctionnaire de la police, l’indicateur lui a demandé d’envoyer ses hommes pour aller sécuriser le bateau SPSL. Mais il dit lui avoir demandé s’il a rempli les formalités administratives nécessaires. Son interlocuteur lui aurait répondu qu’un certain Marcos serait en train de suivre la procédure. « Je lui ai fait comprendre que tant que je n’ai pas la quittance, je ne pouvais pas envoyer mes hommes au front », aurait servi l'officier à son collaborateur. Il a confié avoir dit à l’indicateur faire ramener le bateau au port de Cotonou pour les formalités.

 

Mais toutes les tentatives pour le faire auraient été vaines. Le policier a souligné que l’échec était dû aux conditions métérologiques affreuses. Il a donc décidé de ramener le capitaine et 8 autres membres de l’équipage à la terre pour enclencher la procédure de violation des eaux du Bénin. Ce qui a été fait. Il a expliqué avoir fait la même procédure pour un navire qui s’est irrégulièrement introduit dans les eaux du Bénin en avril 2024. Il apprend que les propriétaires avaient payé 5 millions de FCFA comme pénalité. Il déclare n’avoir jamais parlé ni d’argent ni du produit pétrolier avec l’indicateur.

 

A  son tour, le chef de service information et communication de la préfecture maritime  s'est défendu  contre les accusations d’abus de fonctions notamment les échanges et déclarations de l’indicateur.

 

Il a confirmé l’appel de l’indicateur. Celui-ci s'est même déplacé pour le voir dans son bureau. Le marin dit lui avoir opposé les tarifs réglementaires de transbordement. Selon lui, une journée de transbordement dans les eaux du Bénin coûte 650 000 FCFA en plus des frais de sécurité de l’opération qui fait 150 000 FCFA et des frais de douane. A ses dires, l’intermédiaire avait souhaité faire l’opération sur 5 jours et il lui aurait donné le montant approximatif de 5 millions CFA. D’après les accusations présentées par la Cour, les deux hommes auraient discuté sur les prix dans le but de trouver une entente. Mais, le marin a réfuté cette thèse. Il n’a rien eu de tel, a-t-il fait savoir devant les juges. Il a déclaré avoir essayé d’expliquer la réglementation à l’intermédiaire qui le lui a demandé parce qu’il n’est pas instruit. « Je n’ai pris aucun franc chez lui », a-t-il assué à la Cour.

 

Le représentant du ministère public a insisté en demandant aux fonctionnaires s’ils ont reçu de l’argent lors des présumées négociations avec leur collaborateur. « Négatif », a répondu chacun des trois officiers devant la Cour. Après les quatre dépositions qui ont duré un peu plus de trois heures, le président des céans a renvoyé le dossier au 12 décembre 2024 pour continuer les débats. A cette prochaine audience le capitaine et les autres membres de son équipage seront écoutés.

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