Matar Diagne
“Je ne serai plus vivant quand vous lirez ce texte. J’ai décidé de mourir dans la dignité plutôt que de vivre dans le déshonneur.” C’est par ces mots que commence une lettre poignante, chargée d’émotion diffusée sur Facebook, mardi 11 février 2025 à 12h 25, heure de Cotonou. Matar Diagne, son auteur, est un étudiant en Sciences juridiques et politiques à l'université Gaston Berger de Saint Louis.
En joignant l’acte à la parole, il s’est effectivement donné la mort dans sa chambre au campus de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis selon le récit de plusieurs médias sénégalais. “A la Une, la mort de l’étudiant Matar Diagne”, titre l’Agence de presse sénégalaise (APS) dans une revue de presse, ce mercredi 12 février.
“ Les circonstances de la mort de l’étudiant Matar Diagne dont le corps a été découvert dans sa chambre au campus de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis sont largement commentées par les quotidiens reçus, mercredi, à l’Agence de presse sénégalaise (APS).” , informe le média.
Depuis 2020 où il a brillamment eu son baccalauréat en finissant premier de son centre, apprend le défunt dans sa lette, “une grave maladie m’a atteint et elle persiste jusqu’à maintenant.” Matar Diagne se présente comme “une personne réservée dont l’intégration était quelque peu pénible.” Ses efforts d’intégration ont été anéantis par son état de santé. Retranché dans son monde, il n’a pas eu la compassion de nombre de ses compairs qui, sans cesse, le pointaient du doigt. “ Malgré tout, j’ai décidé d’aller à l’université et de poursuivre mes études, et là, je vis entre l’UFR et ma chambre. Mais certaines personnes ne voient pas cela d’un bon œil. « Ki dafa bonn, dou dem thi nitt yi. Beugoul nitt yi. » disent-ils. Cela m’a davantage isolé. Pourtant, il aurait été facile pour eux de comprendre que c’est ma situation qui me pousse à m’isoler. Certaines personnes sont très intelligentes, mais elles peuvent se révéler être des cons quand il s’agit de comprendre la situation de leurs semblables.”, se désole-t-il à leur sujet.
L’étudiant parti pour toujours apprend que “l’isolement, additionné à la souffrance de la maladie, a eu des conséquences néfastes” sur lui. “Je ressens une tristesse intense. Il y a une tempête dans mon cœur.”
Matar Diagne s’est aussi efforcé d’avoir le soutien de certaines personnes à qui il s’est confié sur le mal qui le ronge. Hélas! En lieu et place de la compréhension et du soutien qu’il attendait, il est devenu sujet des comérages. “La fois oú j’ai eu à me confesser, mes confessions ont été exposées en public. La conséquence en est que je me méfie, je n’ose même pas en parler avec des amis. Face à cette situation, je me muets dans mon silence, comme je sais si bien le faire depuis que je fus enfant. Et ce qui est triste, c’est qu’il y a des personnes qui s’adonnent aux moqueries avec joie, sans mesurer les conséquences de leurs actes.”
En décidant de tourner le dos à cette vie, Matar Diagne veut garder un espoir : “Peut-être que ma mort ouvrira les yeux à certains étudiants et certaines familles.” Dans sa lettre posthume, conseille le regrettez, “N’isolez personne, n’ignorez personne, ne vous moquez de personne et ne fuyez personne. Rapprochez-vous des gens qui s’isolent, parlez leur et essayez de les comprendre, sans les juger.”
Son suicide, dit-il, “ je l’ai fait en quelque sorte en guise de sacrifice pour que géne bayi xell les autres qui ont des soucis. Ne jugez jamais avant de connaître toute l’histoire.” Matar Diagne a insisté sur ce qui l’a précipité : “ce qui m’a le plus déchiré, ce sont les conjectures sur ma maladie, les calomnies et les accusations non fondées. (...). C’est une situation qui m’a profondément détruit. Je ne vais citer personne, car je ne veux que personne soit pris pour cible.”
Désormais dans l’au-delà, Matar Diagne laisse derrière lui un manuscrit qu’il désire publier à titre posthume. “J’ai terminé mon roman intitulé « LA FUITE DES INDÉSIRABLES », il parle de l’émigration clandestine. Je l’ai envoyé à la maison d’édition Harmattan-Sénégal avec mon adresse mail [email protected]. Aidez-moi à le publier, c’est sans doute la seule trace que je laisserai sur terre.”
Il laisse derrière lui également des proches qui lui sont très chers dont sa mère affaiblie par un AVC. Il souhaite que les retombées de ce livre, même si c’est un seul exemplaire vendu, soient dédiées à la prise en charge de l’AVC de sa mère.
Le défunt demande pardon pour son geste et demande à ceux qui l’ont connu et aimé de le porter dans leurs prières quotidiennes.
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Ravys
il y a 1 moisArsène Junior
il y a 1 mois