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A l’instar de dix sept autres pays africains, le Niger a signé avec la Russie un accord pour l’acquisition de l’énergie nucléaire. Ledit accord a été signé lors de la visite du ministre de l’énergie russe, Sergueï Tsiviliov avec le groupe russe Rosatom et le ministère de l’énergie nigérien est « un mémorandum de compréhension mutuelle » sur la coopération dans le domaine du nucléaire civil, selon un communiqué du ministère de l’énergie russe. « Notre tâche est non seulement de participer à l’extraction de l’uranium, mais de créer tout un système de développement du nucléaire civil au Niger », a souligné Sergueï Tsiviliov.
Mais cette volonté du ministre russe peut ne jamais être une réalité. En effet, le développement de l’énergie nucléaire demande plusieurs exigences qui s’apparentent, dans le cas du Niger, à des obstacles structurels.
La première difficulté concerne la structuration du réseau électrique. Les infrastructures actuelles du Niger, comme celles de la plupart des pays sahéliens, ne permettent pas d’intégrer en l’état l’énergie produite par une centrale nucléaire conventionnelle ou même par de petits réacteurs modulaires (SMR). Les capacités de transmission et de distribution sont clairement insuffisantes pour accueillir de tels volumes et garantir l’équilibre du réseau .
La deuxième est financière et concerne le coût. Une centrale nucléaire coûte des milliards de dollars. Par exemple, celle d’El-Dabaa en Egypte, financée à 85% par prêt russe, a coûté au total 29 milliards de dollars. Le budget annuel du Niger est inférieur à 3 milliards de dollars en 2025. Par ailleurs, alors que la junte peine à payer les fonctionnaires, il paraît impensable de mettre en œuvre un programme aussi coûteux pour l'Etat. Le recours au nucléaire implique des investissements massifs, assortis d’un risque élevé de dépendance financière de longue durée vis-à-vis du partenaire étranger.
Enfin, la troisième difficulté concerne le manque de compétences techniques. Selon les spécialistes du nucléaire, les compétences requises pour concevoir, exploiter et réguler une filière nucléaire manquent cruellement au Niger, comme partout dans la région. Quelques programmes de formation, essentiellement basés à l’étranger sont évoqués dans les déclarations qui ont suivi la visite du ministre russe de l’énergie à Niamey, mais le déficit d’ingénieurs, d’autorités de sûreté et de main-d’œuvre qualifiée ne pourra être comblé qu’en plusieurs générations.
Faut-il le rappeler, la Russie a signé des accords de développement du nucléaire civil avec dix huit pays en Afrique mais seul un seul de ces projets a pu être concrétisé. Il s’agit de celui avec l’Egypte. Tous les autres peinent à être mis en œuvre. Derrière ces effets d'annonces, on peut donc flairer une possibilité pour Moscou de sécuriser ses approvisionnements en uranium en attribuant des permis miniers à Rosatom. Un tel partenariat est donc gagnant à court terme pour les Russes et incertain pour le Niger car le développement effectif de capacités nucléaires civiles dans le pays, s’il se réalise un jour, ne verrait pas le jour avant des décennies alors que le pays pourrait répondre à ses besoins énergétiques immédiats en développant les énergies renouvelables (solaire, éolien) qui paraissent plus adaptées, plus faciles à mettre en œuvre, immédiatement disponibles et financièrement plus accessibles.
Même s’il paraît difficilement réalisable, Moscou réussit avec ce projet, un tour de maître. Il offre à la junte nigérienne des éléments pour entretenir l'espoir, tout aussi lointain soit-il, d'un avenir nucléaire à ses concitoyens. « Notre tâche n'est pas simplement de participer à l'exploitation minière de l'uranium. Nous devons créer tout un système pour le développement de l'énergie atomique pacifique au Niger», avait à juste titre déclaré, le 28 juillet, le ministre russe de l'Energie Sergueï Tsivilev lors de sa visite à Niamey.
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