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Démolition de maison à Togbin : la Commission donne sa version, l’huissier Bérenger Agbogba ne démord pas

Démolition de maison à Togbin : la Commission donne sa version, l’huissier Bérenger Agbogba ne démord pas

Au Bénin, une démolition de maisons sise dans l’emprise du projet « Route des pêches » mise en œuvre par la Société Immobilière et d’Aménagement Urbain (SImAU) fait couler beaucoup d’encre et de salive. L’huissier Me Bérenger Agbogba, propriétaire d’une des maisons crie à l’injustice malgré les explications de la commission interministérielle d’expropriation.

Au Bénin, une démolition de maisons sise dans l’emprise du projet « Route des pêches » mise en œuvre par la Société Immobilière et d’Aménagement Urbain (SImAU) fait couler beaucoup d’encre et de salive. L’huissier Me Bérenger Agbogba, propriétaire d’une des maisons crie à l’injustice malgré les explications de la commission interministérielle d’expropriation.

Démolition d'immeuble à Togbin

Démolition d'immeuble à Togbin

« Tirez sur moi ! je ne demande que le dédommagement pour libérer et vous ne voulez pas payer. Tirez ! tirez ! tirez ! Il n’y a plus de justice non ? Il n’y a plus de droit, il n’y a plus de lois. Tirez, je vous en prie, je vais en finir. Tirez sur moi ! Tireeez !!! ». C’est le cri de détresse d’un homme perché sur le toit d’un grand immeuble face à une armada d’engins de démolition manu-militari à Togbin dans la commune d’Abomey-Calavi. 

 

La vidéo de la scène devenue virale sur les réseaux sociaux depuis le 24 février a provoqué une onde de choc. Les Béninois et au-delà, épris de compassion pour le propriétaire, un huissier de justice, ont laissé libre cours à l’expression de leur révolte face à ce qu’ils considèrent comme une injustice et un abus de pouvoir qui prendrait des proportions alarmantes dans le pays.

 

« Il faut avoir été dans le cas de ce monsieur comme moi ou beaucoup à Togbin qui ont choisi le silence pour comprendre ce qu'il vivait en ce moment précis. Se voir arracher son bien avec des miettes comme dédommagement et ce dans l'indifférence générale, il y a de quoi avoir des envies suicidaires », a réagi en témoignage, un artiste de musique urbaine populaire de Cotonou. 

 

Hors du Bénin, des activistes comme le Camerounais Franklin Yamsi, détracteur de Patrice Talon qu’il combat pour sa supposée proximité avec la France, se sont saisis de la vidéo comme une preuve de "l’inhumanité" supposée du Président béninois. « LA MÉCHANCETÉ DE PATRICE TALON AU BÉNIN 🇧🇯 COPIE L’INHUMANITÉ DE OUATTARA EN CÔTE D’IVOIRE 🇨🇮 : ON CASSE ICI SANS INDEMNITÉ LA MAISON 🏠 D’UN CLERC D’ HUISSIER BÉNINOIS, MONSIEUR AGBOGBA... », a -t-il critiqué dans un post devenu aussi viral.

 

Pourtant, on est bien loin d’être situé dans cette affaire. Bérenger Agbogba et la Commission interministérielle en charge de l’expropriation sur l’emprise du projet « Route des Pêches » tirent le drap, chacun de son côté.

 

Agbogba accusé de "dénégation" et de "résistance"

 

La réponse des autorités ne s’est pas faite attendre. Très vite, un communiqué de la commission interministérielle en charge du dossier est diffusé pour apporter un autre son de cloche. Face aux accusations de non dédommagement, la commission assure qu’elle est infondée.

 

« Il a circulé ce weekend sur les réseaux sociaux, un élément vidéo exposant un homme, titulaire d’une charge publique, perché sur un immeuble situé dans l’emprise de la « Route des Pêches », qui insinuait dans ses propos que l’Etat aurait entrepris de démolir son immeuble sans l’avoir préalablement dédommagé », rapporte d’abord le communiqué en date du 26 février.

 

Au sujet de ce qu’elle appelle une « dénégation », la Commission Interministérielle en charge du dédommagement des personnes affectées par les projets le long de la route des Pêches fait une clarification en quatre points.

 

Primo, elle rappelle qu’aux termes de la loi, « l’expropriation pour cause d’utilité publique obéit, en République du Bénin, à des règles strictes fixées par la Constitution et en particulier, par la loi 2013-01 du 14 août 2013 portant Code foncier et domanial en République du Bénin telle que modifiée et complétée par la loi 2017-15 du 10 août 2017. »

 

Secundo, la commission argue que les « dispositions des articles 232 et 242 du code foncier et domanial », lui confèrent le plein pouvoir de consigner le montant de l’indemnisation d’une personne affectée, dès qu’il est fixé « même en l’absence de tout contentieux ».  Une possibilité à laquelle elle s’est gardée d’avoir recours dans le cadre de l’indemnisation des personnes affectées par la Route des Pêches. « Malgré cette possibilité prévue par la loi, la commission d’expropriation ne recourt à la consignation que dans des cas exceptionnels, notamment l’indisponibilité ou l’impossibilité de la personne affectée à se faire payer directement pour des motifs qui lui sont exclusivement imputables, ou le refus délibéré de collaborer sans motif valable ».

 

Tertio, la commission explique que le propriétaire de l’immeuble de Togbin objet d’une vague d’indignations après la vidéo virale a opposé une résistance au processus de son indemnisation. « Dans le cas d’espèce, l’immeuble a été évalué à deux reprises sur les observations de l’intéressé. De même, la Commission et les autorités concernées par le projet prévu, sont restées constamment en contact avec lui pour son indemnisation intégrale. Malgré les multiples relances qui lui ont été adressés afin de signer les actes nécessaires à son paiement, l’intéressé s’est contenté d’exiger l’intégration de son immeuble dans le projet ou la reconstruction dudit immeuble sur une autre portion du même site en expropriation », peut-on lire dans le communiqué. 

 

Quarto, la commission dit avoir consigné le montant de l’indemnisation et accuse le propriétaire de l’immeuble d’avoir fait la sourde oreille à un dernier appel à la libération. «  Resté délibérément inflexible sur ses demandes qui ne répondent strictement d’aucune norme en la matière, le montant correspondant à son indemnisation a été consigné à la Caisse des Dépôts et Consignation conformément à la loi ». A ce sujet, poursuit la commission,  « c’est après toute ces diligences que l’autorité expropriante a engagé la phase judiciaire qui a abouti à la reddition de l’ordonnance contradictoire d’envoi à la prise de possession n° 031/CSAF-CPI-SPU1/2023 du 22 novembre 2023, de la Cour spéciale des affaires foncières. » Et, apprend elle,  « malgré la décision de clôture, une dernière mise en demeure par communiqué en date du 22 janvier 2024 a été assurée par le Ministre en charge du Cadre de Vie et des Transports, chargé du Développement Durable. Face à toutes ces démarches de l’Administration, l’intéressé est resté passif. » 

 

Agbogba réplique et dénonce des pressions

 

 

Non identifiable dans la vidéo de son cri de détresse, l’huissier Bérenger Agbogba a aussitôt répliqué après le démenti de la commission sur ses accusations de non dédommagement.  Dans une nouvelle vidéo relayée par le journaliste et activiste Hugues Comlan Sossoukpè, il se présente comme « la victime de la barbarie orchestrée à Togbin, le jeudi 22 février 2024, sur un immeuble dans une opération dite d’expropriation. »

 

Cette vidéo, dit l’exproprié, il la fait, « surtout parce que j’ai commencé par recevoir sérieusement de la pression pour venir dire n’importe quoi sur les réseaux sociaux ou bien dans le journal ou bien pour venir mentir au peuple ». Pour lui, pas question que cela arrive. « Je ne mentirai jamais au peuple, le mensonge ne fait partie de ma vie. »

 

Au sujet des faits, martèle-t-il sans citation, « ils ont cassé ma maison en violation de la loi et de la Constitution de la République du Bénin. Et maintenant, ils veulent que je vienne dire à la télé que rien ne s’est passé, que tout va bien. »

 

Dans sa réaction enregistrée dans un bureau où l’on peut apercevoir sa robe noire, Me Agbogba dit qu’il n’a pas encore été dédommagé comme la commission l’affirme. « Chers Béninois et Béninoises, la communauté internationale, je vous prie de considérer comme vrai, une seule chose : la reconstruction de ma maison en ses lieu et place. Si vous voyez ma maison reconstruite en ses lieu et place, applaudissez ceux qui m’ont cassé et sachez qu’ils m’ont rendu justice », a-t-il déclaré. 

 

Contre lui-même et ses proches, avertit l’exproprié en bras de fer avec la commission, « tant qu’ils ne vont pas me construire ma maison, ne croyez en rien. Même si moi-même, je viens vous dire j’ai perçu l’argent, j’ai fait ci, j’ai fait ça, ne me croyez pas. Si mes parents viennent, n’importe qui vient vous dire quoi que ce soit, que j’ai été dédommagé, ne les croyez pas. Ce serait sous pression. »

 

 

Pour ce qui est du dédommagement, maintient-il, « à la date d’aujourd’hui 26 février 2024, j’ai été prendre mon relevé de compte que j’ai communiqué à la commission d’expropriation et j’ai constaté qu’aucun franc, même pas un franc n’a été viré sur mon compte. Donc, sachez que rien ne m’a été payé.  Ne considérez que vrai, la reconstruction de mon bâtiment et la réinstallation de mes meubles qu’ils ont détruit. »

 

2 commentaires

2 commentaires

Toni
il y a 6 mois
@ZOUGOUTOU, Svp Mr comment vous aviez que cette affaire est politisé et c'est pour salir le nom du gouvernement hien...quoi quand la vérité est là, vous voulez toujours contourner et mettre sa sous un autre forme... cette affaire n'est pas quelque chose de politique.
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ZOUGOUTOU
il y a 6 mois
L'Etat est maître et propriétaire de toutes les terres et domaines relevant de son territoire. Il donne à un individu le passe- droit pour s'installer. Mais le même état décide de reprendre le domaine pour un plan d'urbanisation ou pour des projets, il décide f'exproprier en octroyant aux occupants- à qui le droit d'occuper a été donné de quoi s'installer. J'ai l'impression que cette affaire Agbogba est politisée pour salir le gouvernement. Sinon comment comprendre qu'un huissier, un homme du domaine, vienne la verser sur la place publique. L'expropriation était, est, sera car l'Etat peut décider à un moment donné de gérer autrement une zone. C'est lui, le propriétaire de tous les domaines. Alors, M. Agbogba, reprends-toi car si tu te laisses manipuler, l'Etat aura toujours raison sur toi. Malgré tous tes soutiens du moments. Réfléchis tranquillement et décide en ton âme et conscience. Que Dieu te guide!
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