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Reckya Madougou : la libération de l’ex-ministre béninoise réclamée par un organisme de l’ONU

Reckya Madougou : la libération de l’ex-ministre béninoise réclamée par un organisme de l’ONU

Le Groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire réclame la « libération immédiate » de Reckya Madougou, ex-ministre béninoise, condamnée à 20 ans de réclusion criminelle en décembre 2021 par la CRIET pour « financement du terrorisme ».

Le Groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire réclame la « libération immédiate » de Reckya Madougou, ex-ministre béninoise, condamnée à 20 ans de réclusion criminelle en décembre 2021 par la CRIET pour « financement du terrorisme ».

reckya-madougouReckya Madougou

Rebondissement dans le dossier Reckya Madougou. Le Groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire a adopté, au terme de sa 94e session du 29 août au 2 septembre 2022, un avis concernant Reckya Madougou. Dans cet avis rendu public à travers un document en date du 2 novembre 2022 et consulté par Banouto, le Groupe de travail de l’ONU a réclamé la « libération immédiate » de l’opposante et ex-ministre béninoise. Il demande au gouvernement béninois de prendre les « mesures urgentes pour la libération immédiate » de Reckya Madougou.   

L’organisme des Nations Unies a fait ces demandes au motif que « la privation de liberté de Mme Madougou est arbitraire ». Candidate recalée du parti ''Les Démocrates'' à la présidentielle 2022, Reckya Madougou a été arrêtée par la police le 3 mars 2021 sur le pont de Porto-Novo alors qu’elle revenait d’un meeting. Selon ses avocats, l’opposante a été interpellée sur la base d’un mandat d’amener décerné contre elle par le procureur spécial près la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET).

Violation d’une série de dispositions

Dans sa plainte adressée au Groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire, la défense de Reckya Madougou a fait observer que cette interpellation de leur cliente viole le Code de procédure pénale suivant lequel le procureur spécial ne peut décerner un mandat d’amener dans les seuls cas de flagrant délit, ce qui n’est pas le cas dans ce dossier.

Le Groupe de travail, dans son avis, a fait suite à cette demande de la défense et a conclu que Reckya Madougou a été arrêtée en « l’absence d’un titre légal d’arrestation ». « Le Gouvernement ne justifie pas pourquoi un juge d’instruction ne pouvait pas être saisi pour décerner un mandat d’amener », a fait observer le Groupe de travail.

L’organisme onusien a aussi jugé que la détention provisoire de Reckya Madougou n’est pas conforme aux dispositions de l’article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Les experts de l’ONU ont également noté une violation de la présomption d’innocence de l’opposante béninoise. Ils estiment que le Gouvernement béninois n’a pas suffisamment démontré que les déclarations du président Patrice Talon dans une interview à RFI le 30 avril 2021 ne risquaient pas de préjuger l’issue du procès.

Reckya Madougou a été condamnée le 10 décembre 2021 à 20 ans de réclusion criminelle par la CRIET au terme d’un procès qui a duré 24 heures. Le Groupe de travail s’est aussi penché sur la durée du procès de Reckya Madougou. « La tenue en une seule journée d’un procès portant sur une infraction pénale grave donne à penser que la culpabilité a été déterminée avant l’audience », jugent-ils.

Dans leur avis, les experts ont noté l’ex-ministre de la justice de Boni Yayi n’a pas bénéficié de son droit de communiquer de manière confidentielle avec ses conseils immédiatement après son arrestation. L’organisme des Nations Unies a relevé en outre que la candidate recalée à la présidentielle 2021 n’a pas bénéficié de son droit de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense.

Droit à une réparation

En plus de la remise en liberté immédiate réclamée, le Groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire juge qu’il doit être accordé à Reckya Madougou le droit obtenir réparation. Notamment sous la forme d’une indemnisation, conformément au droit international.

Les experts onusiens demandent « instamment » au gouvernement de veiller à ce qu’une enquête approfondie et indépendante soit menée sur les circonstances de la « privation arbitraire de liberté » de Reckya Madougou, et de prendre les mesures qui s’imposent contre les responsables de cette violation des droits de l’ex-conseillère spéciale du président togolais Faure Gnassingbé.

Le Groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire prie le gouvernement et la défense de Reckya Madougou de l’informer de la suite donnée aux recommandations formulées. Reste à savoir si les autorités béninoises feront suite à cet avis.