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Révision de la constitution au Bénin : la Cour constitutionnelle perd des compétences au profit du Sénat (Gilles Badet)

Révision de la constitution au Bénin : la Cour constitutionnelle perd des compétences au profit du Sénat (Gilles Badet)

Au Bénin, Gilles Badet, ancien secrétaire général de la Cour constitutionnelle, revient sur les attributions retirées au juge constitutionnel au profit du Sénat, notamment en matière de contrôle des propos politiques et de sanctions à caractère politique.

Au Bénin, Gilles Badet, ancien secrétaire général de la Cour constitutionnelle, revient sur les attributions retirées au juge constitutionnel au profit du Sénat, notamment en matière de contrôle des propos politiques et de sanctions à caractère politique.

Gilles Badet, ancien secrétaire général de la Cour constitutionnelle

Gilles Badet, ancien secrétaire général de la Cour constitutionnelle

La réforme constitutionnelle a redéfini le périmètre d’intervention de la Cour constitutionnelle, en retirant à l’institution plusieurs compétences qu’elle exerçait jusqu’ici. « Il y a transfert des compétences de la Cour constitutionnelle vers le Sénat. C'est ce qui s'est passé », affirme Gilles Badet, évoquant un changement majeur dans l’architecture institutionnelle.

 

L’invité du Grand format du dimanche 21 décembre 2025 sur Bip radio a relevé que pendant des années, la Cour constitutionnelle s’était illustrée par des décisions portant sur les déclarations publiques d’acteurs politiques, jugées contraires à l’unité nationale ou à l’esprit de la Constitution. Gilles Badet rappelle, à titre d’exemple, la saisine de la Cour après des propos d’une ministre de l’Agriculture appelant à un troisième mandat présidentiel. « Un ministre ne parle pas comme ça », avait alors estimé la Cour, censurant ces prises de position sans prononcer de sanctions pénales.

 

Ces prérogatives disparaissent avec la révision du 14 novembre 2025. « Aujourd'hui, la révision de la Constitution a dit que la Cour constitutionnelle ne peut plus statuer sur des déclarations », explique l’ancien haut fonctionnaire. Les compétences ainsi retirées sont désormais confiées au Sénat.

 

« Le Sénat maintenant va veiller à ce que les acteurs politiques n'aient pas des attitudes et ne tiennent pas des propos qui menacent l'unité nationale, l'intégrité du territoire, la paix, la sécurité », précise-t-il. Tous les acteurs politiques, à l’exception de certaines hautes autorités, peuvent être concernés.

 

L’institution n’est également « plus compétente pour apprécier les décisions de justice », mettant fin à la possibilité pour les citoyens de saisir directement la Cour constitutionnelle pour violation des droits de l’homme à l’issue d’une décision judiciaire, en dehors du parcours classique tribunal–cour d’appel–Cour suprême.

 

Selon Gilles Badet, cette évolution rapproche le Bénin des pratiques observées dans d’autres États. « Ça s'arrête là. La Cour constitutionnelle n'a plus rien à voir », résume-t-il, tout en appelant les juridictions ordinaires à intégrer pleinement les droits fondamentaux dans leurs décisions.

 

À la différence de la Cour constitutionnelle, dont les décisions avaient surtout un impact moral ou symbolique, le Sénat dispose d’un levier nouveau : des sanctions politiques. « Nature politique veut dire on vous retient vos droits civils, c'est-à-dire la capacité d'être élu », indique Gilles Badet. Il souligne que les modalités précises seront fixées par le règlement intérieur de l’institution.

 

Le juge constitutionnel conserve toutefois son rôle central. « Le juge constitutionnel demeure le gardien de l'esprit et de la lettre de la Constitution », rappelle l’ancien secrétaire général. Il précise que les décisions ou lois issues du Sénat peuvent toujours être contrôlées par la Cour constitutionnelle, dans le délai désormais fixé à trente jours après promulgation.

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