Dans l’imaginaire collectif du football africain, la CAN est la compétition des surprises. Les certitudes s’y effritent, les puissances vacillent, et ce sont souvent les équipes que l’on n’attend pas qui s’installent sur le trône. Dans cette édition marocaine qui s’ouvre le dimanche 21 décembre 2025 à Rabat, six sélections apparaissent comme de véritables outsiders, capables de faire dérailler les plans des favoris.
Tunisie : le retour par la solidité
Éliminée dès le premier tour lors de la précédente édition, la Tunisie se présente avec l’envie de réaffirmer son statut. Versés dans le groupe C avec le Nigeria, l’Ouganda et la Tanzanie, les Aigles de Carthage s’appuient sur une base connue : la rigueur défensive. Sous la direction de Sami Trabelsi, nommé en février, la sélection a traversé la campagne de qualification pour la Coupe du monde 2026 sans encaisser le moindre but.
Avec seize participations consécutives et un titre continental en 2004, la Tunisie conserve un ADN profondément ancré dans la CAN. Peu spectaculaire, souvent critiquée pour son manque de créativité offensive, elle compense par une organisation collective éprouvée. Le nul accroché face au Brésil (1-1) lors d’un match amical récent a renforcé cette image d’équipe difficile à manœuvrer. L’environnement marocain, proche culturellement, pourrait aussi jouer en sa faveur, offrant un supplément d’âme à un groupe en quête de rachat.
RD Congo : la montée en puissance assumée
Quatrième surprise de la dernière CAN, la République démocratique du Congo aborde le tournoi avec un statut nouveau. Placés dans le groupe D avec le Sénégal, le Bénin et le Botswana, les Léopards avancent avec ambition et continuité. Depuis l’arrivée de Sébastien Desabre à l’été 2022, la sélection congolaise affiche une progression constante, validée par des succès marquants face au Cameroun et au Nigeria lors des barrages africains pour le Mondial 2026.
Desabre a reconduit une ossature expérimentée, emmenée par Cédric Bakambu, Chancel Mbemba et Fiston Mayele. Solide défensivement, disciplinée tactiquement, la RDC sait souffrir avant de frapper. En 2025, une seule défaite figure à son bilan, concédée face au Sénégal après avoir mené au score. Reste l’interrogation de la gestion des matchs à élimination directe face aux grandes nations, un palier que cette génération cherche encore à franchir.
Algérie : entre doute et renaissance espérée
Doublement éliminée au premier tour lors des deux dernières CAN, l’Algérie se présente au Maroc dans un climat d’incertitude. Placés dans le groupe E avec le Burkina Faso, la Guinée équatoriale et le Soudan, les Fennecs veulent tourner la page des désillusions. Le limogeage de Djamel Belmadi en 2024 a ouvert une nouvelle ère, confiée à Vladimir Petkovic.
Auréolé de son expérience avec la Suisse, le technicien serbo-suisse est chargé d’orchestrer un renouvellement progressif. Si la qualification pour la Coupe du monde 2026 a été acquise sans trembler sur le plan comptable, le contenu des matchs a suscité de nombreuses critiques. Entre anciens cadres de 2019 et jeunes pousses encore tendres, l’Algérie avance sans certitudes. Le premier tour apparaît comme un test mental majeur pour une sélection qui n’a plus gagné le moindre match de CAN depuis sa finale victorieuse de 2019.
Égypte : l’heure ou jamais pour Salah
Nation la plus titrée du continent avec sept sacres, l’Égypte reste une énigme permanente. Dans le groupe B, face à l’Afrique du Sud, l’Angola et le Zimbabwe, les Pharaons abordent la compétition avec leurs recettes traditionnelles : discipline tactique, efficacité et expérience. Sous la houlette de Hossam Hassan, légende du football égyptien, la sélection peine toutefois à convaincre sur la durée.
À 33 ans, Mohamed Salah dispute l’un de ses derniers grands tournois internationaux. Deux finales perdues et aucun titre continental avec l’Égypte pèsent sur son parcours. Autour de lui, Omar Marmoush et Mostafa Mohamed incarnent la relève offensive. Si les certitudes manquent, l’Égypte demeure une équipe redoutable dès lors qu’elle franchit la phase de groupes, capable de faire déjouer n’importe quel adversaire dans un match couperet.
Nigeria : le paradoxe permanent
Finalistes malheureux de la dernière CAN, les Super Eagles arrivent au Maroc après une immense désillusion : l’échec dans la course au Mondial 2026. Placés dans le groupe C avec la Tunisie, l’Ouganda et la Tanzanie, les Nigérians incarnent le paradoxe du football africain. Capables du meilleur comme du pire, ils disposent pourtant d’un réservoir de talents unique sur le continent.
Victor Osimhen et Ademola Lookman, Ballons d’Or africains récents, symbolisent cette richesse offensive. Depuis la prise de fonctions d’Éric Chelle en janvier, le Nigeria n’a pas perdu dans le temps réglementaire en 2025. Mais l’élimination face à la RD Congo en barrages a mis en lumière une dépendance criante à Osimhen. Fragilisé défensivement depuis la retraite de William Troost-Ekong, le Nigeria avance avec des interrogations internes, sans jamais perdre son statut de menace crédible.
Cameroun : l’imprévisibilité comme marque de fabrique
Englués dans des tensions institutionnelles et une instabilité chronique, les Lions Indomptables abordent la CAN dans un contexte agité. Versés dans le groupe F avec la Côte d’Ivoire, le Gabon et le Mozambique, les Camerounais ont vécu une préparation chaotique. Conflits de gouvernance, incertitudes autour du staff technique, climat délétère : rien ne semble réuni pour un parcours serein.
Pourtant, l’histoire du Cameroun rappelle sa capacité à se transcender dans l’adversité. Souvent là où on ne l’attend pas, parfois au bord du chaos, cette sélection a déjà démontré qu’elle savait se nourrir de ses propres turbulences. Grand nom du football africain, le Cameroun demeure une inconnue redoutable, capable de sombrer comme de surprendre, fidèle à sa réputation d’équipe indomptable.
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